mardi 16 septembre 2008

La Plate tombe du Vanneau

Devant le chœur de l'ancienne église du Vanneau, Deux-Sèvres, on voit encore une plate-tombe qui a tous les caractères des pierres funéraires des XIIe et XIIIe siècles.
L'usage des pierres tombales garnies d'inscriptions et de sculptures gravées en creux ne paraît pas remonter au-delà du XIIe siècle. Mais, à partir du XIIIe, elles devinrent nombreuses et reçurent souvent une décoration remarquable.
Antérieurement à cette époque, lorsque la coutume d'inhumer dans les églises les corps des personnes distinguées ou auxquelles on voulait faire honneur eut été bien établie, on recouvrit la fosse d'une simple dalle ou pierre funéraire de même grandeur. On n'y mit aucun signe d'abord, ni aucune inscription; mais bientôt, pour marquer la place de la sépulture de ceux que l'on voulait plus spécialement honorer et dont on tenait à garder le souvenir, on grava sur la pierre, soit un signe, soit le nom du personnage défunt.
Les signes marquant la profession ou la qualité des personnes furent primitivement mis en usage, et ce n'est que plus tard que vinrent les inscriptions. Les pierres tombales portant de simples insignes, rustiques, guerriers ou religieux, sont donc les plus anciennes et remontent, sans aucun doute, à la fin du XIe siècle ou au commencement du XIIe. La dalle funéraire du Vanneau (figurée ci-contre), bien que brisée dans le sens de sa largeur, permet encore de distinguer, gravées en creux et au trait, une croix patronale et une épée.
L'épée est courte, large au talon et progressivement diminuée pour former la pointe. La poignée, comme celles des épées du XIIIe siècle, est en forme de croix.
La croix, plus grande que l’épée qui la côtoie, est une ancienne croix processionnale sans image du Christ, telle qu'on avait l'habitude de la porter aux cérémonies du culte, depuis les temps les plus reculés. Antérieurement au XVe siècle, on ajouta l'image du crucifix à ses ornements; puis, à partir de cette époque, ceux de la Vierge et de saint Jean que l'on plaça sur les croisillons.
Il nous paraît facile de donner une signification à ces insignes guerriers et religieux, et à la place d'honneur occupée par la plate tombe du Vanneau.
Cet humble reste du passé marque l'âge approximatif de la vieille, église qui sert actuellement de halles, et permet d'en faire remonter la construction à la seconde moitié du XIIe siècle. Rien à dire, d'ailleurs, des petites croisées en style roman qui sont dépourvues de toute intention artistique.
A une époque de cette -période séculaire, dont il est impossible de déterminer la date certaine, le miles, ou chevalier, seigneur du Vanneau, qui fut inhumé dans l'église, en était le protecteur et le patron, ainsi que l'indique la place de sa tombe devant le chœur.
La qualité de chevalier est représentée par l'épée ; et celle de patron, par la croix processionnale et patronale. Le patron autrefois avait la préséance aux processions, et il est tout naturel de penser que la grande croix qui accompagne l'épée a été gravée sur la pierre tombale pour perpétuer un souvenir de dignité et d'honneur.
La tombe qui nous occupe ne nous parait point avoir été violée. En faisant des fouilles, on retrouverait sans doute, le sceau du chevalier patron. Au moyen âge, en effet, lorsqu'on ne détruisait pas les sceaux lors de la mort des individus, on les plaçait dans leur tombe, afin de prévenir la falsification des chartes.
Dès le XIIe siècle, les sceaux usités par les seigneurs,.Chevaliers, écuyers, représentaient les armoiries de leurs possesseurs. Ils se multiplièrent au XIIIee siècle, et ils indiquaient presque toujours, en légende, le nom et la qualité de celui qui en faisait usage.
La plate tombe du Vanneau renferme donc, sans, doute, la première page intéressante de l'histoire de cette commune, et nous serions reconnaissants à monsieur le maire et conseiller général, de faire opérer les recherches utiles pour arriver à la solution de ce problème archéologique.

8 juillet 1885 C. Saint-marc.

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